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Dans une chronique de l’année dernière, je me posais déjà cette question, que je qualifie aujourd’hui d’existentielle, tant les parents ne s’imaginent plus pouvoir en faire l’économie pour leur progéniture. Je me réjouis aujourd’hui que le cri d’alerte que contenaient mes propos ait fini par être entendu et qu’une réaction en haut-lieu soit venue remettre de l’ordre dans ce business. Le ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle a en effet déclaré son intention de combattre ce fléau et a annoncé son plan de substitution des cours payants donnés aux élèves par des cours de soutien gratuits, compris dans la charge horaire des enseignants, et appelés cours de sacrifice et de citoyenneté.
Le phénomène, longtemps décrié par les responsables des académies et délégations, a été le plus souvent porté à charge des écoles privées, accusées d’organiser «l’entremise» des professeurs du public avec des élèves du public et du privé confondus. En matière de cours de soutien, la supériorité de qualité de l’enseignement n’est pas en faveur des élèves du privé, car ceux-ci ont le plus massivement recours à cette forme de dopage, certainement car ils en ont le plus les moyens. Les élèves du public, exemptés de frais de scolarité, auraient une plus grande propension à supporter cette dépense compensatoire plutôt que de se plaindre du déficit de qualité du lycée. Pourtant, ce sont les parents du privé, qui estiment ne pas en avoir pour leur argent dans les écoles privées, qui sont doublement pénalisés. Et ça ne s’arrête pas là, car les élèves des missions étrangères et des écoles marocaines homologuées, réputées prodiguer un enseignement importé de qualité n’y échappent point. La facture de scolarité y étant beaucoup plus élevée, on devine sans peine que les «maîtres traiteurs» des cours de soutien particuliers n’y vont pas de main morte en matière de tarifs. Ceux-ci peuvent atteindre les 400 DH de l’heure, voire 600 DH si la garantie d’assimilation est incluse. De plus, l’achat en gros ne fait pas l’objet de discount.
Bien entendu, tous les enseignants du public ou ceux du privé ne sont pas concernés. Il faudra ainsi user de beaucoup de pédagogie pour ne pas braquer l’ensemble du corps enseignant par solidarité corporatiste avec la minorité. Le plus insaisissable dans ce marché est que devant la soumission des parents et l’addiction des élèves, les professeurs ne développent pas de sentiment de culpabilité, puisque le mécanisme présente tous les signes de régularité: l’enfant est faible, l’enseignement collectif qui lui est dispensé en classe hétérogène ne lui suffit pas, on lui administre des doses de soutien et il s’en ressent mieux. Mais au fil des mois et des années, du fait de la peur d’arrêter ces cours, ne serait-ce que pour essayer, on n’est plus capable d’évaluer si le sujet se sent véritablement mieux avec les cours que sans. Pour l’enfant, le risque de tenter l’autonomie est trop grand et pour le parent, prêt à se saigner pour ses enfants, il n’est digne de lui couper l’alimentation. Stopper l’hémorragie
Ainsi, cela se passe interactivement au niveau des parents et des élèves. De mon expérience, c’est un phénomène qui naît au primaire, fruit de l’angoisse des parents de voir leur enfant plafonner ou régresser dans une matière donnée. Mais soyons plus précis, il s’agit plutôt du comportement de la note en classe que du comportement pédagogique de l’enfant, ce qui peut être bien différent. Erigée en indicateur suprême de la valeur de l’élève et de sa courbe d’apprentissage, la note devient la monnaie «des échanges» entre les parents et l’école. Dès que le curseur pointe vers le bas, l’enseignant trouve moins de difficultés à convaincre les parents de la nécessité des cours de soutien qu’à aider leur enfant à se ressaisir en classe. J’ai passé une vie à combattre ce fléau. Presqu’autant qu’à faire de la résistance contre les propositions récurrentes d’utiliser les classes pour de «profitables» cours du soir de masse aux lycéens. Car dans notre pays, comme ailleurs dans les pays émergents, le stade dégénératif des cours de soutien systématiques aux petits est bien l’industrie des cours du soir aux lycéens. Dès que le système s’installe comme une machine à dispenser des cours déjà donnés, souvent dans les mêmes conditions qui expliquent leur non-assimilation, on tombe dans le commerce immoral.
La perversion du mécanisme réside dans l’addiction que développent les enfants envers l’assistance de l’adulte, qui passe pour le Maître à tout expliquer ou plutôt à faire comprendre. Les meilleurs systèmes pédagogiques ne sont pas ceux où l’enfant est sur-encadré, mais bien ceux où il développe le plus d’autonomie dans l’apprentissage.
La vraie pédagogie du soutien
En tant que citoyen convaincu que l’on peut faire autrement, j’appelle tous les parents à soutenir cette disposition que le ministère a lancée contre un fléau national en faisant de la résistance au moins contre les cas d’abus de soutien (comme je les décris dans la chronique d’avril 2013). De même, j’invite les enseignants, à qui ces cours peuvent sembler légitimes et à qui ils sont de toute façon profitables, de se convertir au moins dans la vraie pédagogie de soutien, qui est une discipline à part. Cette pédagogie consiste à accompagner l’élève pour le rendre plus autonome, pas à lui refaire le soir la leçon qu’il n’a pas pu ou peut-être voulu assimiler le jour.