Les exemples des productions collectives réalisées dans des classes sont en bas de page.
I) De la poésie à l'école...
Si on devait faire un bilan de la poésie à l'école, on serait bien obligé d'admettre que ce bilan est lourd, voire très lourd. Chaque fois que j'ai pris une classe (souvent, étant ZIL) et que j'ai demandé aux élèves ce qu'évoquait pour eux la poésie, ils m'ont toujours parlé de diction, de par coeur, de note ou autre jugement de valeur superficiel mais jamais de genre littéraire ou de type d'écrit. Ce n'est pas faute d'avoir répété l'expérience à de nombreuses reprises, ces représentations sont toujours désespérément les mêmes, du CP au CM2 et dans tous les milieux. Aucun enseignant n'aurait idée de dire qu'il ne travaillera jamais le conte ou l'écrit documentaire autrement que par la répétition par coeur. Pourtant, c'est ce que presque tout le monde fait pour la poésie. Il est grand temps de sortir la tête du sac et de (re)considérer la poésie comme un genre littéraire à part entière, et qui mérite d'être étudié comme tel, d'autant qu'il peut aider l'élève à mieux appréhender l'implicite et la métaphore dans d'autres types de textes.
II) Mes objectifs
Mes séances de poésie sont orientées vers l'observation du fonctionnement du jeu métaphorique en poésie et du réinvestissement de ces observations pour produire des écrits poétiques. La poésie n'est pas la rime. Ce qui fait la poésie c'est la transformation du réel en ce que nous en percevons, à la manière des peintres impressionnistes, mais pas un simple jeu de sons. Un poète professionnel est généralement capable de produire de la poésie tout en la faisant rimer. Moi pas, et mes élèves encore moins. De là, j'ai choisi de faire de la poésie et de laisser la discrimination auditive à nos très chers collègues de grande section de maternelle qui y font si souvent un travail remarquable.
III) Mes poèmes
Je ne peux évidemment pas vous donner les textes que j'utilise en classe pour des raisons de droits d'auteur mais je vais quand même vous donner les références :
* Le chat et le Soleil de Maurice Carême
* La cascade de Christian Broutin (Comptines du temps qu'il fait, éditions Actes Sud)
* Mignonne souris blanche de Maurice Carême
* La grêle (en cachant le titre) de Christian Broutin (Comptines du temps qu'il fait, éditions Actes Sud)
* La rosée (en cachant le titre) de Christian Broutin (Comptines du temps qu'il fait, éditions Actes Sud)
* La préférée de Maurice Carême
IV) La phase d'observation
* Le chat et le soleil : Lecture à voix haute par un élève, relecture par l'enseignant. Poser la question : Quand l'auteur dit : "Deux morceaux de soleil", de quoi parle t-il en réalité ? Laisser aux élèves le temps qu'il faut pour qu'ils trouvent par eux-mêmes qu'il s'agit des yeux du chat, même si ça doit durer 10 minutes. Ensuite, demander : Pourquoi l'auteur s'est t-il permis d'appeler les yeux du chat comme ça ? Sur quoi s'est-il appuyé ? A ce stade, les élèves trouvent rapidement. Insister sur le fait que c'est le point commun de la brillance qui a permis cette transformation. Sans point commun, pas de transformation possible.
* La cascade : Lecture à haute voix par un élève (bon lecteur), relecture par l'enseignant. On ne s'intéresse qu'aux quatre dernières lignes. Reformuler ce qui a été conclu sur le poème précédent puis demander aux enfants de retrouver les transformations qui sont dans les 4 dernières lignes de la cascade, en précisant qu'il y en a plusieurs qui s'entremêlent. Le bruit de la cascade est transformé en musique, la cascade est transformée en douche, la montagne (en s'appuyant sur la musique et le douche) est personnifiée. A chaque fois, insister sur le point commun qui a rendu la transformation possible.
* Mignonne souris blanche : Lecture à haute voix par un élève, relecture par l'enseignant. Faire chercher les transformations aux élèves. Pourquoi la souris blanche est-elle transformée en flocon de neige et en argent ?
* La grêle (titre caché) : Expliquer aux élèves que dans les poésies de Christian Broutin, la réalité n'est mentionnée que dans le titre alors que le corps de la poésie n'utilise que la "forme transformée". Le but du jeu est de deviner le titre uniquement à partir de la forme transformée. Lecture par un élève, relecture par l'enseignant. Explication des termes "crépitement" et "nacre". Discussion sur ce dont le poème peut parler. Ajout du titre.
* La rosée (titre caché) : Même démarche que pour la grêle.
* La préférée : Repérer les transformations rendues évidentes par le mot "fait". Demander aux enfants comment ils imaginent cette petite fille, en s'appuyant sur la façon dont elle a été transformée : Cheveux blond clair ou blond foncé ? Bien coiffée ou mal coiffée ? Que fait-elle ? Couleur des yeux ? Justification de la transformation des yeux en sources...
V) Préparer une production
Pour produire nos poèmes, on s'appuiera sur la manière de Christian Broutin : réalité uniquement dans le titre puis corps du poème en utilisant que des formes transformées de ce qui renvoie au titre. On ne peut pas demander aux enfants de produire une telle poésie directement. .