Aucune raison suggérée, aucune crainte ne pourrait ravir mon bonheur .Il me semble que j’ai compris parfaitement l’image de mon bonheur .Longtemps, j’ai rêvé sur des rives inconnues aux autres mortels ; j’ai savouré la senteur de la poésie et des frissons qui embaument l’esprit .Je crois que je suis maître de mon destin .A cet instant, je regarde à travers la croisée de ma chambre les grandes chênes qui laissent s’envoler leur haleine parfumée, L’azur qui palpite de joie et cette cohue d’oiseaux qui peuplent l’air de leur chanson monotone.e
Aucune voix, aucune vibration ne vient rompre l’ordre des choses .Tout semble permettre une joie parfaite qui ressemble peut-être à une communion d’amour. Tout est grâce, beauté et grâce .N’est-ce pas un appel d’amour et d’union céleste qui conquiert notre âme lorsqu’un doux sentiment caresse nos rêves ?e
Sans doute, dans ces moments chers de l’existence, on a de la peine à lâcher bride à l’imagination pour pouvoir s’arrêter sur chaque instant vécu et en mesurer l’ampleur. Quel est ce discret démon qui berce doucement notre âme ?e
Aussi longtemps que j’exulte au cœur de mon ivresse, je ne m’interroge plus sur l’origine de ma joie. Je me laisse envahir plutôt par l’inexplicable harmonie des choses. Mais, je demeure là à rêver, à évoquer la rumeur des soirs d’été ou le silence des nuits d’automne. Mon esprit vagabonde à travers les vastes contrées où le temps tombe en désuète, s’abolit ainsi qu’une chimère. J’entends, pourtant, une voix insolite qui m’incite à adorer la vie, non plus la vie restreinte, régulière et monotone, mais cette couleur variable où la poésie règne en princesse. Je rêve d’un poème ineffable où la tendresse du monde éclate d’une manière si sensible que je n’ose point penser à autre chose.e
Je suis là …, je traverse le bois du nord et je respire l’odeur de la mer. Il me semble que je suis le premier homme qui puisse reconnaître la senteur de ce paysage. C’est là où les lombeaux du passé, les ruines des années et la peur de l’abîme se dissipent à jamais.e
Tout vous communique de nouveaux désirs et une nouvelle sensation du bonheur. Le présent n’est plus ce fardeau qui vous écrase mais il est plutôt cette perpétuelle rêverie où le regard fixe les instants et en détermine la présence. C’est l’instant des jouissances et des voluptés inconnues pour moi qui les poursuit incessamment. Je suis persuadé que la douceur de ce soir même n’est due qu’à moi seul. Qu’on m’enferme dans une cellule grise et noire. Je saurais comment recréer mille façons de vivre et de m’y échapper. Je songerai, par exemple, à ces condamnés de « la Condition Humaine » qui bravent la mort grâce à leur action. J’applaudirai ce Meursault qui a voulu être exécuté devant l’indifférence du monde …e Maintenant, j’ai opté pour le silence et pour la nuit. J’aimerais être perdu, oublié sous le sourire des ténèbres, car je n’ai rien à dire !!e